Assurés confinés, défendez-vous !
Publié le :
04/05/2020
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Dans la continuité de nos précédents articles sur l’assurance pertes d’exploitation et l’épidémie de Covid19/ coronavirus, les différents cas rencontrés nous conduisent à faire un point d’étape sur les refus de garanties et la possibilité de les contester (II), en essayant d’en tirer quelques principes pour l’avenir (I).
I - Vous pensiez avoir agi en professionnel responsable et prévoyant, soucieux de bien protéger son entreprise en signant des Conditions Particulières de plusieurs pages listant une dizaine de garanties. Or, vous découvrez à l’occasion de la crise sanitaire que votre assureur refuse de vous indemniser.
Les spots publicitaires flatteurs vous reviennent en mémoire dans un souvenir rageur !
Mais vous découvrez, en outre, que ces refus ne concernent pas seulement les pertes d’exploitation.
C’est, par exemple, le cas des assurés titulaires de contrats de prévoyance complémentaire mobilisables en cas d’arrêt maladie, qui se sont arrêtés pour garder leurs enfants parce que les autorités les y ont incités au motif que l’assurance maladie les indemnisera. Pour refuser sa garantie l’assureur objectera que l’arrêt de travail n’est pas consécutif à une maladie … alors que le COVID19 à l’origine de cette situation en est une ! Refus contestable.
Nous nous posons alors tous une question de bon sens : quel est l’intérêt de souscrire plusieurs contrats et de payer des cotisations/primes pendant des années, pour se retrouver seul et sans secours à un moment critique ?
C’est l’occasion de rappeler un principe élémentaire qui a peut-être été perdu de vue.
L’assurance bien comprise doit viser à garantir les « gros pépins », les petits risques pouvant être conservés (ou « auto assurés ») dans la mesure où ils ne mettront pas en péril votre patrimoine personnel ou professionnel.
Ainsi, garantir la tôle froissée est dérisoire au regard du risque de perdre le véhicule acheté à crédit. Dérisoire, aussi le remboursement de l’aspirine au regard du coût d’une hospitalisation, ou la garantie perte de denrées frigorifiées comparée à la perte de plusieurs mois de chiffre d’affaires …
Est-il bien utile d’être assuré pour les petits sinistres si les gros ne le sont pas ? C’est économiquement coûteux à l’entrée et ruineux à la sortie. Nous en faisons aujourd’hui l’amère expérience.
Les banques, par exemple, l’ont bien compris : elles ne demandent généralement plus que les emprunteurs soient assurés en cas d’arrêt maladie ou de chômage, trop fréquents et trop chers, mais elles exigent systématiquement qu’ils le soient en cas de décès/invalidité totale et définitive (le « gros pépin »).
Dans le même esprit, il y a la question des franchises imposées par les assureurs pour limiter leur sinistralité. Par réflexe, les assurés souhaitent généralement les franchises les plus basses possibles, alors qu’en réalité ils pourraient avoir avantage à ce qu’elles soient plus élevées si cela a pour effet de réduire le coût de la garantie.
Evidemment, les distributeurs d’assurances, qui sont les premiers bénéficiaires de la vente de garanties coûteuses, mais qui se révèlent inutiles un moment critique, essaieront de vous convaincre du contraire !
Il faudra y repenser lorsqu’il s’agira de revoir nos contrats au sortir de la crise, si nous y survivons par nos propres moyens.
Nous devrons nous alléger en cotisations/primes et nous concentrer sur les garanties essentielles, peut-être en nous limitant aux assurances obligatoires de par la loi, déjà assez nombreuses, ou rendues obligatoires par un contrat, et en faisant la chasse aux « trous » de garanties.
L’assurance protection juridique, en plus des défenses/recours liées à chaque contrat, peut également être utile pour faire face à la judiciarisation croissante des rapports sociaux et professionnels, en particulier dans les litiges importants entraînant des frais d’expertise, souvent très élevés.
II - Pour l’heure, il faut ne pas hésiter à contester ces refus verbaux et/ou écrits, par mail ou courrier recommandé. D’expérience, certains assureurs reviennent sur leur décision.
A ce stade, l’intervention d’un conseil est nécessaire - et peu onéreuse - pour ne pas passer à côté de certains points litigieux des polices d’assurances, qui peuvent être nombreux.
- Il y a d’abord l’information pré contractuelle due au client qui doit être formelle, datée, et donner les définitions de chaque garantie et surtout mentionner les exclusions.
Dans les derniers cas examinés on constate souvent, soit que cette information est absente, soit qu’elle ne répond pas aux prescriptions légales, ce qui peut justifier l’annulation de la garantie et la condamnation de l’assureur à des dommages et intérêts, ou l’inopposabilité d’exclusions passées sous silence.
Je n’ai pas souvenir d’avoir lu des informations précontractuelles mettant en exergue les exclusions. On a le sentiment d’une partie de cache-cache.
- Il y a ensuite la question du lien entre les divers documents contractuels, par des références parfois absentes, imprécises, ou discordantes.
On constate une dématérialisation croissante des documents contractuels, en particulier des Conditions Générales, sur support numérique consultables sur INTERNET, qui peut être problématique car il arrive que les assureurs les modifient au fil du temps en fonction de la sinistralité, et évidemment dans un sens restrictif.
Or, ce sont les documents contractuels dans leur version contemporaine de la souscription qui s’appliquent. Il est parfois difficile de retrouver avec certitude la bonne version. C’est un problème pour l’assureur.
Cela peut devenir litigieux et entraîner l’inopposabilité à l’assuré de certains documents contenant des dispositions qui lui sont défavorables.
- Enfin, il y la question classique des exclusions contractuelles qui doivent être formelles et limitées, claires et précises, et en caractères très apparents. Pour de multiples raisons, en particulier si elles nécessitent une interprétation, elles peuvent se révéler nulles ou inopposables à l’assuré.
Les exclusions rencontrées visant à exclure les maladies contagieuses, épidémies et pandémies se révèlent être d’une grande variété dans leur formulation ou leur présentation.
Pour en apprécier la validité, le recours à un conseil averti et expérimenté est nécessaire.
- En cas d’expertise, également, afin que le chiffrage du préjudice respecte les prévisions contractuelles, l’assistance d’un conseil technique et juridique sera utile. Pour l’heure, tant que la reprise n’est pas effective, il peut être envisagé de demander une provision.
En cas de refus persistant de l’assureur, la contestation devra faire l’objet d’une action en justice qui ne peut être qu’individuelle, devant le tribunal compétent (civil ou commercial du lieu de l’assuré), chaque situation étant particulière, ce qui exclut les actions de groupes ou collectives.
Actuellement, on constate que les assureurs inquiets de voir monter l’insatisfaction des clients, cherchent - en ordre dispersé et en se critiquant les uns les autres - des solutions visant à désamorcer les contestations et proposent selon les cas :
- la suspension ou la gratuité de quelques mois des cotisations/primes ;
- le versement d’un forfait ;
- l’offre la plus risible : la suspension des franchises d’assurance auto pendant la période de confinement … au cours de laquelle le risque d’accident était quasiment nul du fait de l’interdiction de circuler !
Il ne faut pas tomber dans le piège d’accepter l’aumône là où il serait possible d’obtenir l’application pleine et entière de la garantie, même au prix d’un procès.
La survie de votre entreprise peut en dépendre. Dans ce cas, assurés confinés, défendez-vous !
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